Avec Corneille, nous sommes à un tournant de l’histoire du salut. Durant les 7 premiers chapitres, nous avons vu comment l’Évangile s’est répandu au sein même des juifs en Israël. Dans les chapitres 8 et 9, on peut constater comment l’Évangile s’est propagé de la Judée à la Samarie. Maintenant, nous voyons comment l’Évangile se répand jusqu’aux extrémités de la terre.
Jésus a dit : « Mais vous recevrez de la puissance quand l’Esprit saint viendra sur vous, et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et en Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac1.8). Arrivé à Corneille, c’est donc un cri de joie que nous devrions exprimer. Amen ! Ce qu’a dit Jésus se réalise ! Quelles qu’aient étés les persécutions, la parole de Christ s’accomplit et rien ne peut empêcher l’Évangile de se répandre.
Seulement, si nous continuons notre petit flash-back, on peut faire une autre observation.
· Dans le récit se déroulant à Jérusalem :
1.2 : les 120 reçoivent l’Esprit et les témoins de cet évènement fut, v.5, des juifs pieux de toutes les nations. Résultat 3000 âmes se convertissent.
· Dans le récit se déroulant de la Judée à la Samarie :
8.5 : Philippe, un homme remplit de l’Esprit, dont on porte un bon témoignage et rempli de sagesse (Ac6.3-6). Il rencontre un Eunuque qui lisait Esaïe intrigué. Résultat, il se convertit.
Les points communs sont que Dieu a utilisé des personnes qui éprouvaient un profond respect pour lui et les a placés sur la route de ceux qui le cherchaient sincèrement. Avec le récit de Corneille, nous en avons encore le même schéma.
CORNEILLE
Corneille est un craignant Dieu. En général, il s’agit d’une expression montrant que la personne n’est pas juive, mais adhère au judaïsme sans pour autant être circoncis. Les raisons qui font que Corneille se soit rapproché du judaïsme ne sont autres que la crainte qu’il éprouve pour le Seigneur. En grec, ce terme est celui qu’on emploie également pour les phobies (« Phobos »). En d’autres termes peut être plus parlant, Corneille avait la phobie de Dieu. Non pas une phobie qui le conduisait à crier dès qu’on parlait de Dieu ou à partir en courant. Mais une phobie qui l’a conduit à avoir une vie pieuse, à faire beaucoup d’actes de compassion en faveur du peuple et à prier constamment.
Rien qu’à la lecture de ces deux premiers versets, la honte m’a envahi. Comment est-ce que moi je considère Dieu ? J’ai dû me résigner et accepter que ce que je vivais, ce n’est pas cette « phobie »… En fait, je ne pouvais pas même me dire que j’avais une quelconque crainte de Dieu. C’était plutôt mon confident, celui vers qui je crie lorsque ça ne va pas en attendant qu’il me fasse du bien.
Si je devais estimer quelle attitude honorait le plus Dieu, je dois alors me dire que Corneille est loin devant. Ca crainte de Dieu le conduisait à avoir une vie exemplaire. Je ne peux pas en dire autant de la « sympathie » que j’éprouve envers Dieu … en fait, c’est Corneille qui est dans le bon, car jamais la Bible ne nous invite à avoir de la sympathie envers Dieu, mais à vivre dans la « phobie » de Dieu.
Bien que le texte ne le montre pas, je pense que si Corneille avait cette crainte de Dieu, c’est à cause l’œuvre que Dieu a entreprise jusque-là au sein de son peuple. Vous savez, ce Dieu qui a créé cette terre, a parlé à Moïse sur le mont Horeb, sortit son peuple d’Égypte, conquit des villes détruits chaque ennemi d’Israël. Toutes ces histoires et davantage, qui étaient sans cesse rappelé lors des fêtes juives de sorte que le souvenir des œuvres merveilleuses de Dieu en faveur de son peuple persiste. Ce sont probablement ces échos-là qui ont touché le cœur de Corneille. D’ailleurs quelle ironie n’est-ce pas ? Quel contraste entre Corneille et les pharisiens.
Mais attention, ce n’est pas parce que Corneille avait la crainte de Dieu qu’il avait pour autant tout ce qu’il lui fallait. Comme je l’ai dit, nous sommes là à une étape charnière de l’histoire du Salut, nous passons la première alliance (l’AT) vers son véritable accomplissement (le NT et l’œuvre du Christ). Corneille n’avait donc pas encore accès à cet accomplissement. Il pensait simplement que le judaïsme était suffisant et comme l’enseigne cette religion, nos œuvres bonnes nous permettrons d’entrer dans le Royaume de Dieu. On ne peut donc pas conclure que Corneille était, à cet instant, déjà converti comme nous l’entendons aujourd’hui. Bien que le fait qu’il est craignant Dieu nous montre toute la sincérité de ces actes, ceux-ci n’étaient pas suffisants pour le rendre participant à l’œuvre du Christ. Si tel était le cas, alors le récit de Corneille s’arrêterait là, au v.2. Mais il continue, quelque chose d’important devait entrer dans sa vie, quelque chose qui fera que ses actes de compassions et sa piété, aussi grands qu’ils fussent, en seront transformés.
Les v.1-2 m’ont beaucoup fait réfléchir. Ils m’ont rappelé que l’état dans lequel j’étais était un état de résignation. J’en étais arrivé à me dire « voilà, c’est ça ma foi, c’est ça que je dois vivre. » Avec en arrière-gout, le gout amer de l’insatisfaction. Pas celui de l’aboutissement du « Voilà ! C’est ça mon appel !! » (ton enjoué). Mais plutôt (soupir) « voilà, je ne serai que ça, que ce chrétien-là. Après tout, il faut de tout non ? » Mais ce récit dans son intégralité m'a fait apprendre une bien sérieuse leçon que Jésus a enseignée bien avant : « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit ; mais tu ne sais d'où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l'Esprit. » (Jn3.8). Cette leçon, Jésus là fait à Nicodème en parlant de la nouvelle naissance. Ce qu’il dit, c’est que la nouvelle naissance ne nous conduit pas à une vie de résignation, mais dans une vie en constante évolution. Nous sommes appelés à constamment évoluer dans la foi ! Cet Esprit est en nous et il souffle, nous conduit sur des sentiers inattendu, inespéré parfois.
Corneille en est la parfaite illustration. Rien (insister fort) dans sa vie ne pouvait lui faire imaginer qu’il allait un jour vivre l’évènement qui suit dans le texte. Non, il vivait sa foi le plus simplement possible. Avec droiture et fidélité. Il n’avait qu’une connaissance très partielle de Dieu et n’avait aucune idée qu’il fallait mettre sa foi en Jésus. Tout ce qu’il voulait c’est être reconnaissant envers ce Dieu qu’il avait partiellement rencontré au travers du judaïsme.
Là encore j’ai pris une claque… Si Nicodème, qui n’avait pas encore la grâce que moi j’ai maintenant à su quand même vivre une piété telle et des actes de compassion tels que Dieu s’en est souvenu (v.4), qu’elle excuse est-ce que je peux avancer pour ma défense ? Mais vous savez, ce passage n’est pas une comparaison qui aurait pour but de nous dire « t’es un bien piètre chrétien ! Même Nicodème faisait mieux que toi ! » Ce passage témoigne, non pas de l’œuvre d’homme, mais de celle de Dieu ! Il est vrai que les actes de Nicodème et sa piété sont en avant. Mais ce n’est pas l’élément central. Ce n’est que 2 versets sur 48. L’élément central est la grâce de Dieu tout simplement. Et aussi forts qu’aient été ses actes, Nicodème n’a jamais été plus méritant que nous avons, de recevoir la grâce de Dieu. C’est une grâce tellement pure qu’aucune action de l’homme ne peut la mériter.
La piété de Nicodème ainsi que ces actes de compassion s n’ont pas été ce qui a convaincu Dieu d’agir. D’ailleurs, le v.4 exprime cette piété et cette compassion dans un langage sacrificiel. Dieu considère donc la piété et les actes de compassion de Nicodème comme étant une offrande qui lui est faite. Et n’oublions jamais cette parole que : « L'Éternel trouve-t-il du plaisir dans les holocaustes et les sacrifices, comme dans l'obéissance à la voix de l'Éternel ? Voici, l'obéissance vaut mieux que les sacrifices, et l'observation de sa parole vaut mieux que la graisse des béliers. » (1Sm 15.22). Ce qui plut à Dieu chez Nicodème n’a pas été la grandeur de ses actes, mais la grandeur de son cœur. Les actes de Nicodème n’ont été que le reflet de son cœur pour Dieu, de cette crainte qu’il avait. Si donc je dois me sentir mal devant ce récit, ce n’est pas parce que je ne fais pas les mêmes œuvres que Nicodème, mais peut-être parce que je n’ai pas le même cœur que Nicodème.
En effet donc, rien dans la vie de Nicodème ne pouvait lui garantir qu’un jour sa vie allait autant être transformée. Il continuait à vivre chaque jour son amour pour Dieu de la manière la plus sincère en lui offrant des « sacrifices », en agissant pour la gloire de Dieu en faveur des autres. Et c’est en plein milieu du « train-train » quotidien de Nicodème qu’un jour Dieu a dit « maintenant c’est l’heure ». Il n’a pas vu le vent arrivé, il l’a juste senti une fois qu’il a été saisi par lui.
PIERRE
Cependant, comme nous l’avons vu dans notre petit flash-back, dans les Actes, Dieu agit rarement tout seul, il aime mettre en action ses enfants. Il prend plaisir à agir au travers d’eux, avec eux. Car il aime être en relation avec nous. Il va donc choisir Pierre. Et là encore, son choix n’est que pure grâce. Pierre n’est pas le plus méritant des apôtres, il n’est pas le plus grand, c’est simplement le choix de Dieu. C’est comme ça.
Mais il y a un parallèle intéressant entre Pierre et Corneille. Il est dit de Corneille qu’il avait comme caractéristique principale d’être pieux, d’avoir des actes de compassion, mais aussi qu’il priait Dieu constamment (v.2b). Pierre quant à lui monta sur le toit en terrasse pour prier. La première réflexion que j’ai eue à la suite de la lecture de ce texte, c’est qu’il peut s’en passer des choses au travers de la prière. Et le plus étonnant est que pour Corneille comme pour Pierre il s’agissait, à la base, d’une action qu’il on fait des centaines de fois avant. Mais Dieu a choisi que ce jour –là, ces prières auront quelque chose de particulier.
Pierre, surement le 2e apôtre le plus connu après Paul, était à Joppé pour une raison qui n’a rien à voir avec Corneille. Il y avait été appelé par les disciples de Tabitha (Dorcas) après sa mort. Cette rencontre permis un évènement extraordinaire la résurrection de Tabitha (Ac9.36-43). Wouha, quel apôtre ce Pierre ! C’est vrai que manifestement, Dieu prend plaisir à agir au travers de lui. Mais il serait, je pense, un tort de considérer la résurrection de Tabitha comme évènement plus grand que ce qu’il se passa avec Corneille. Non seulement parce que le récit de la résurrection ne prendre qu’une petite place dans le livre d’Actes alors qu’une plus grande est laissée à Corneille. Mais aussi parce que ce qui compte davantage pour Dieu n’est pas la résurrection de la chair, mais la résurrection spirituelle. En un sens, l’évènement de notre récit est plus grand que la résurrection de Tabitha. C’est Dieu lui-même qui interpelle Pierre et le prépare, au travers de la vision, à accomplir l’œuvre de grâce qu’il a réservée à Corneille. Et la vision de Pierre est importante parce qu’elle est met vraiment en avant la grandeur de l’œuvre que Dieu veut accomplir et comment la parole de Jésus en Ac1.8 se réalise.
Quel est le but de cette vision ? Je pense que le but est d’apprendre quelque chose à Pierre. Mais quoi ? Il y a ici un piège qu’il faut éviter, celui de se servir d’un texte comme prétexte. Il est très tentant, je vous l’accorde, de se servir de ce genre de texte pour dire « Tu vois, on peut manger de tout !!! » Mais est-ce là ce que Pierre devait apprendre ? Je ne pense pas.
On a vu que Corneille semblait être résigné ne s’attendant pas à ce que les choses qu’il vivait allaient changer à ce point. Pierre ici, semble donner l’image d’une personne plutôt rigide.
Tout comme je vous ai avoué avoir fait l’erreur de penser que ma foi allait rester ce qu’elle était, il y a une deuxième erreur que j’ai faite et que ce texte m’a rappelée. En fait, c’est une erreur que nous sommes tous susceptibles de faire. Mettre Dieu dans une boite. Pierre avait placé Dieu dans une boîte. Regardons au déroulement de la vision.
Une voix forte s’adresse à lui (probablement celle d’un ange), lui présente toutes les espèces animales que cette terre peut comporter et lui dit « abats et mange ». Pierre refuse faisant appel à la loi qui l’interdisait de manger ce qui était impur et la voix forte lui répond « ce que Dieu a purifié, toi, ne le souille pas ! » Et le texte nous dit que cela s’est produit par 3 fois.
Que faut-il comprendre ? Tout d’abord que Pierre est un sacré têtu. Par 3 fois, alors qu’on lui demande de ne pas souiller ce que Dieu a déclaré pur, Pierre refuse de manger. Pour lui c’est clair, un homme pieux doit respecter la loi à la lettre. Cependant, ce qu’il n’avait pas compris, c’était que par cette vision, Dieu était en train de lui dire « ne me soumet pas à la loi, je suis la loi. N’est impur que ce que je considère comme impur et si je te dis que ce n’est plus impur, alors ce n’est plus impur ». Cette leçon était capitale pour le reste du récit (v.28, v.34-35).
Pierre devait comprendre qu’il ne devait pas s’arrêter sur ce qu’il comprenait des Écritures, mais qu’il devait se laisser enseigner par la Parole, cette parole faite chaire qui à présenter au monde notre Dieu. Dieu n’est pas ce qu’on fait de lui. On ne construit pas Dieu à notre image. Nous devons nous laisser façonner par lui. Être prêt à le laisser bouleverser notre vie, comme il est prêt à le faire pour Corneille, mais aussi être prêt à ce qu’il bouleverse même notre intelligence. Ce serait un comble de prétendre mieux connaître Dieu que lui-même n’est-ce pas ? Pourtant je suis sûr qu’on l’a tous déjà fait au moins une fois. Non, Dieu ne peut pas se mettre en boîte.
Aussi choquante que puisse être la Parole de Dieu, nous nous devons d’accepter tout ce qu’elle enseigne même si cela demande que nos convictions les plus sincères doivent changer. Mettez-vous à la place de Pierre. Ce n’est pas par conviction qu’il parlait. Non, Dieu a réellement dit que certains aliments ne sont pas à manger. Et si face à une telle chose Dieu attend de Pierre qu’il accepte un tel changement, à plus forte raison devons-nous en faire de même en ce qui concerne ce que nous croyons être vrai.
Alors non, le but de Dieu n’était pas dire à Pierre qu’il pouvait manger de tout. Mais bien qu’il se devait d’être prêt à accepter la folie de Dieu (à ses yeux) comme sagesse. Et d’ailleurs voici ce qu’il dira de cette vision : « Vous savez qu’il est interdit à un juif de se lier avec un étranger ou d’entre chez lui (…) » Pierre fait encore appel à la loi, mais il ajoutera : « (…), mais Dieu m’a montré qu’il ne fallait dire d’aucun homme qu’il est souillé ou impur ». Voyez donc que même pour Pierre, cette vision ne concernait pas la nourriture, mais bien l’humanité et le plan de grâce que Dieu était en train d’accomplir.
Cette vision a trituré Pierre à un point tel que l’Esprit doit lui dire qu’on venait le voir (v.19-20). Mais parce que Pierre était un disciple fidèle et désireux avant tout de faire la volonté de Dieu, il finit par comprendre cette vision et c’est au travers de lui que Dieu ouvrit le salut aux non-juifs.
Mais vous savez, cette vision a aussi été importante pour les autres apôtres au prêt desquels Pierre a du se justifier (11.1-18). Et regarder la conclusion : « Après avoir entendu cela, ils se calmèrent et glorifièrent Dieu, en disant : Dieu a donc donné aussi aux non-juifs la repentance qui mène à la vie ! »(11.18).
Même si la vérité est choquante dans un premier temps, elle conduira toujours à rendre gloire à Dieu.
CONCLUSION
Frères et sœurs, il y a donc deux choses auxquelles nous devons prendre attention.
Premièrement de ne pas se résigner. Dieu n’agit pas dans la vie de ceux qui sont parfaits et qui sachent tout. Corneille ne savait pas tout sur Dieu et l’apôtre Pierre du encore apprendre malgré les milliers d’âmes qu’il a conduites à Christ. Dieu n’attend pas non plus qu’on accomplisse de grandes choses pour intervenir dans notre vie. Tout est grâce est de la part de Dieu et l’on n’a rien à exiger de lui. Il ne nous doit rien. Vivons simplement notre foi au jour le jour avec droiture et fidélité persévérant de la prière et on peut alors s’attendre à ce qu’il se passe de grande chose dans nos vies. Mais rappelez-vous, la grande chose n’était pas la résurrection d’un mort, mais de participer au plan du Salut de Dieu. Ce qui est grand aux yeux de Dieu parait bien souvent petit à nos yeux.
Et deuxièmement, ne mettons pas Dieu dans une boite. Parce que ce qui est grand à ces yeux semble petit aux nôtres, apprenons à laisser l’Esprit renouveler notre intelligence. Laissons-le nous instruire au travers de la Parole de Dieu.
Nous n’avons pas besoin de nos plans, de nos projets. Mais nous avons besoin de Dieu. Besoin que notre vie soit place entre ses mains. Lui à qui l’imprévu ne fait pas peur, lui seul capable d’accomplir tout ce qu’il dit, lui seul qui sait vraiment ce dont nous avons besoin.
Frères et sœurs, il me semble que la véritable leçon de ce texte est que si nous voulons redonner vie à notre foi, il faut alors peut-être accepter que notre vie ne nous appartienne plus. Si pendant que le vent souffle vous gardez une feuille en main, jamais elle ne pourra se faire emporter par le vent. Mais si vous ouvrez votre main, alors le vent emportera cette feuille et la placera à des endroits qui vous sont inaccessibles. Ouvrons nos mains qui étreignent notre vie et laissons là être emportée par le souffle de l’Esprit.